- Rédigé le 16 décembre 2020
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Alors que les recours pour excès de pouvoir rencontrent une mise en œuvre plus complexe depuis la jurisprudence Hasbro¹, puisque désormais sous condition de délai (deux mois à compter de la mise en ligne sur la base BOFiP-Impôts pour les instructions publiées à compter du 1er janvier 2019), cette procédure demeure néanmoins efficace pour contrer certaine position illégitime de l’administration fiscale.
Le Conseil d’Etat vient en effet de rendre une décision annulant une partie de la doctrine administrative relative au régime fiscal des impatriés².
Dans une décision en date du 21 octobre dernier, le Conseil d’Etat a annulé les paragraphes 80 et 90 du BOFIP du 12 septembre 2012.
Dans cette affaire, un salarié était venu en France redresser une société qui ne pouvait, de ce fait, lui verser de rémunération dans le cadre de cette mission.
Le contribuable, ayant réalisé une plus-value de source étrangère, a sollicité le bénéfice des dispositions de l’article 155 B du CGI, permettant, sous certaines conditions, l’exonération partielle de certains revenus passifs étrangers, incluant les plus-values réalisées par des salariés s’étant installé en France.
L’administration fiscale a refusé de lui octroyer cet abattement de 50% sur la plus-value réalisée au motif que le contribuable n’avait perçu aucune prime d’impatriation au titre de la mission réalisée en France.
Jusqu’à présent, la doctrine administrative limitait en effet l’applicabilité de l’exonération d’impôt sur le revenu de 50% des revenus dits « passifs » à la condition que l’impatrié bénéficie également de l’avantage sur sa rémunération, c’est-à-dire qu’il perçoive une prime d’impatriation.
En effet, il était précisé que si « la personne physique impatriée ne perçoit aucun des éléments de rémunération liés à son activité professionnelle cités au premier alinéa du II-B § 80, elle ne peut pas prétendre, au titre de l’année concernée, au bénéfice de l’exonération de 50 % d’impôt sur le revenu sur certains de ses « revenus passifs et certaines de ses plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux » (BOI-RSA-GEO-40-10-30-10 n°90).
Les contribuables ont donc sollicité du Conseil d’Etat l’annulation de la doctrine administrative précitée en soutenant que « les commentaires attaqués fixent une règle nouvelle entachée d’incompétence en subordonnant le bénéfice de l’exonération du II de l’article 155 B du code général des impôts à la perception effective de revenus exonérés en application du I de ce même article ».
Le Conseil d’Etat, s’appuyant sur l’objectif poursuivi par le législateur, s’est rangé du côté des contribuables dans sa décision du 21 octobre dernier, confirmant ainsi l’annulation des paragraphes 80 et 90 au motif qu’ils méconnaissaient les dispositions législatives qu’ils ont pour objet d’interpréter et, sont, pour ce motif, entachés d’incompétence.
Même si cette décision ne rendra pas notre régime des impatriés aussi intéressant que certains dispositifs existants dans d’autres pays tel que le régime de remittance basis prévu au Royaume Uni, ou celui de la taxe forfaitaire de 100.000 euros en Italie en contrepartie de la non-imposition de tous les revenus financiers étrangers (à l’exception toutefois des plus-values de cession de participations substantielles), elle permet, en tout état de cause, de renforcer l’attractivité de ce régime, ce qui semblait indispensable compte tenu du contexte économique inédit que traverse actuellement la France.
Cette décision est d’autant plus importante que les salariés en situation de mobilité internationale se font de plus en plus rares compte tenu de leur coût pour l’employeur d’origine et qu’à l’avenir, les primes d’impatriation, telles que nous les avons connues depuis ces quinze dernières années, auront peut-être vocation à disparaître.
¹CE, 13 mars 2020 n°435634 indiquant qu’il n’est désormais plus possible de contester un passage de la doctrine de l’administration fiscale sans condition de délai
²CE, 21 octobre 2020 n°442799
Lucie assiste les particuliers dans le cadre de leurs problématiques fiscales.
Lucie partage son activité entre le Conseil aux groupes familiaux, en matière notamment de transmission et de gouvernance, et le Conseil aux investisseurs en capital, pour lesquels elle intervient en matière de structuration juridique et fiscale de carried interest, de management package, et lors d’opérations d’apports-cessions.
Melissa partage son activité entre le Conseil aux groupes familiaux, en matière notamment de transmission et de gouvernance, et le Conseil aux investisseurs en capital, pour lesquels elle intervient en matière de structuration juridique et fiscale de carried interest, de management package, et lors d’opérations d’apports-cessions.